LE FINANCEMENT DE L A FORMATION DE NOS SALARIÉS

COMPLEXITÉ, IMPRÉCISIONS ET INCERTITUDES

La réforme du financement de la formation de nos salariés est en application depuis septembre 2018. Cette réforme va bouleverser complètement nos habitudes. Le nouvel OPCO disposera de fonds moindres, et chaque branche ne disposera plus de la totalité de sa collecte.

La présente note est rédigée le 1er juillet 2019 et tient compte des informations arrêtées ou précisées à cette date. Des précisions ou directives sont encore attendues. Pour mieux comprendre l’état actuel, le plan suivant est proposé:

I – Bref historique

II – Fonctionnement de l’OPCO/EP

III – Dévolution des OPCA Actalians Agefos à OPCO/EP: Financement de la formation

IV – Quelques remarques ou informations

I – BREF HISTORIQUE

Après le FAFTIS, l’OPCA Droit, le notariat adhère à l’OPCA/PL dont le nom d’usage est « Actalians ».

Il s’agit d’un OPCA réservé alors aux Professions Libérales et constitué sous l’égide de l’UNAPL.

L’OPCA est principalement un organisme collecteur et finance le coût des formations de nos salariés en respectant des règles qui lui sont imposées et contrôlées.

En 2018, le rapprochement de l’UNAPL avec U2P aboutit à la création de l’OPCA/PEPS regroupant le monde artisanal, le commerce de proximité et les professions libérales. L’OPCA/PEPS après l’OPCA PL a obtenu son agrément.

Le rapport Marx/Bagorski, rapport commandé par le ministère du Travail, du 24 août 2018, préconisait (ce qui a été réalisé d’ailleurs) la réduction de plus de moitié des OPCA existants. Leur nombre a été ramené à 11.

Ainsi le Notariat a choisi l’OPCO numéro 10 dit « OPCO des entreprises de proximité ». Avant le 31 décembre 2018 (date impérative pour choisir l’OPCO) OPCA/PEPS dépose le dossier nécessaire auprès du Ministère du Travail en vue de l’agrément.

L’instance politique dirigeante impose alors le rapprochement avec les Agefos PME qui n’avaient fait aucun choix dans les délais impératifs (31 décembre 2018).

Quoi qu’il en soit, aujourd’hui sont intégrées à l’OPCO/EP (entreprises de proximité):

– Les entreprises, à quelques exceptions près, en provenance d’Actalians, OPCA PEPS,

– Des entreprises dans le champ des Agefos. OPCA/EP regroupant donc à ce jour 54 branches:

– 23 en provenance d’Actalians

– 31 en provenance des Agefos

A ce stade, on constate que:

– Agefos verra son activité divisée de moitié

– Agefos a perdu 26 branches

– Actalians a perdu 2 branches (géomètres et architectes).

II – FONCTIONNEMENT

Les instances sont les suivantes:

–Un conseil d’administration de 60 membres:

  • 30 sièges pour le collège salariés à partager entre les organisations syndicales.
  • 30 sièges pour le collège employeurs se répartissant à son tour: 15 sièges pour les employeurs en provenance d’Actalians et OPCA PEPS et 15 sièges pour les employeurs en provenance des Agefos.

–Un bureau de 10 membres.

–Puis différentes sections comme auparavant. Le nombre n’est pas encore arrêté mais il y aura des regroupements, cela est inévitable. On ne peut imaginer 54 sections; les OPM seront sans doute regroupés avec d’autres professions juridiques, la section nous concernant sera donc élargie.

La présidence à ce jour est assurée par Sylvia Veitl, représentante des salariés et la vice-présidence est assurée par Philippe Gaertner, pharmacien et membre de l’UNAPL.

Assistent aux réunions un commissaire du gouvernement et un contrôleur financier d’État.

Dans ce fonctionnement, il y a une difficulté majeure résultant des statuts de l’OPCO/EP: les décisions sont prises par le Conseil d’administration à la majorité des deux/tiers. Du fait d’une rivalité caractérisée en fonction des origines de chacun, cette majorité est difficilement atteignable. Cela explique les nombreuses séances pour désigner un directeur général :

– Arnaud Muret, ancien directeur d’Actalians a été désigné directeur général de OPCO/EP

– Joël Ruiz, ancien directeur des Agefos, a été désigné directeur adjoint en charge de la « coordination nationale du réseau de proximité territoriale ».

Les missions de l’OPCO/EP sont principalement:

– Le financement des dispositifs de formation, notamment l’alternance, et le développement de l’apprentissage.

– Apporter un appui technique aux branches professionnelles dans la gestion de l’emploi et des compétences,

– Assurer un service de proximité auprès des TPE-PME pour les accompagner dans l’analyse et la définition de leur besoin en matière de formation

– Assurer la collecte des contributions financières des employeurs à la formation professionnelle et à l’alternance jusqu’au jour où (en 2021) la collecte sera faite par l’URSSAF.

A partir de 2021, nos cotisations, au moins pour le « légal » seront remises à l’URSSAF et gérées par France Compétences (qui en attendant 2021 recevra nos cotisations). Elles seront reversées par l’OPCO.

C’est France Compétences qui redistribuera l’argent à son bon vouloir aux OPCO. France Compétences fera seule les attributions et privilégiera les demandeurs d’emploi et les chômeurs. On évoque un chiffre de prélèvement de la part de France Compétences de l’ordre de 50 %

Il semble raisonnable de penser aujourd’hui que France Compétences (ou l’URSAFF) ne recevra et ne gérera que la partie dite « légale » soit:

– 0,55 % pour les entreprises de moins de 11 salariés,

– 1 % pour les entreprises de plus de 11 salariés,

– 0,66 pour la taxe d’apprentissage.

Dans cette hypothèse, alors, l’OPCO/EP conservera la maîtrise des cotisations dites « conventionnelles ».

Il y aura donc une très forte baisse des fonds disponibles au titre du « plan » qui s’appelle dorénavant « plan de développement des compétences » (PDC) La Pro A remplace aujourd’hui les périodes de pro; en sont exclus les titulaires d’une licence.

III – DÉVOLUTION DE OPCA / ACTALIANS/ AGEFOS EN FAVEUR DE OPCO / EP

Voici le schéma:

– La personnalité juridique des anciens OPCA/OPCO s’est arrêtée le 1er avril

2019.

– Les comptes tant d’Actalians que d’Agefos doivent être arrêtés à la date du 31 décembre 2018 et certifiés pour cette date.

– Pour continuer l’activité et le financement de la formation, des mandats de gestion ont été donnés par OPCO/EP enfaveur des anciens OPCA dont Actalians.

  • Actalians a été le premier organisme àbénéficier d’un tel mandat.

– Mais cette gestion ainsi faite par les OPCA (dont Actalians) doit être intégréeà l’arrêté des comptes au 31/12/2018.

Cela est donc très compliqué.

– A ce jour la collecte réalisée en février 2019 sert à financer les actions de formation réalisées en 2018.

– Pour financer les formations réalisées en 2019 (donc actuellement) elles seront financées par l’appel de cotisation assise sur les salaires 2019 qui sera faite de la manière suivante:

  • Septembre ou octobre 2019: il sera appelé 75 % du légal
  • Le solde du légal sera appelé en 2020
  • Quant au « conventionnel » il devrait être appelé (s’il y a une reconduction) en février 2020

– On se sert donc de nos réserves pour financer les actions de formation réalisées en 2019 mais il y a obligation de faire l’arrêté de comptes à la date du 31/12/2018. Il est donc hors de question d’utiliser les réserves au-delà de la collecte assise sur les salaires 2019.

– La cotisation légale (0,55 % pour les moins de 11 salariés et 1 % pour les plus de 11 salariés) sera évidemment collectée puisque c’est la Loi.

– Mais au-delà du légal, il y a le conventionnel. Il faut donc être certain que toutes les branches reconduiront le « conventionnel ». au titre des années 2019 et 2020 pour pouvoir utiliser, à partir des réserves, les sommes correspondantes et financer ainsi les formations réalisées en 2019.

– Il est donc demandé « aux commissions mixtes paritaires » de prendre aujourd’hui l’engagement de ne pas diminuer le « conventionnel » et que ce dernier sera bien reconduit pour les années 2019 et 2020.

Avec cette solution, les réserves correspondantes au « conventionnel » pourront être utilisées car l’arrêté des comptes est fait au 31/12/2018. Il faut que savoir pour le notariat que les réserves sur le « légal » ont été entièrement utilisées à la date du 30 avril 2019.

IV – QUELQUES REMARQUES

– Tout est très complexe: rôle de France Compétences, de l’URSAFF.

– France Compétences, à partir du légal, (0,55 % pour les moins de 11 ou 1 % pour les plus de 11) fera seule les attributions après un prélèvement de 50 % environ.

– Restera préalablement à l’initiative de la branche, le « conventionnel ». Faut-il le maintenir? Il faut s’interroger à ce sujet, il y a des arguments pour (solidarité entre nous) et des arguments contre (ne pas verser le « conventionnel » à l’URSAFF).

– Le but de la loi est de promouvoir l’alternance, l’apprentissage. Le notariat devra se pencher sur l’apprentissage et s’ouvrir à ce sujet.

– Les formations au titre du « plan » (dit aujourd’hui plan de développement des compétences) seront très touchées par le prélèvement de France Compétences, et seront donc, par rapport au passé, très amputées. Il faudra donc s’attendre à des critiques de la part de certains.

– Chaque branche ne pourra utiliser plus que sa collecte après imputation des sommes prélevées par France Compétences.

CONCLUSION

Telle est résumée la situation à ce jour.

Il faut laisser du temps à OPCO/EP pour se mettre en place. Il faut aussi comprendre que nos dirigeants politiques entendent favoriser l’alternance et l’apprentissage au détriment du plan. Quel est donc l’avenir du financement de la formation de nos salariés, sachant que les actions de formation du notariat relèvent principalement du plan.

Dominique PERINNE,

Administrateur, invité au comité directeur